Publié le 3 avril 2023
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Mis à jour le 5 septembre 2024
le 12 juin 2023
Campus Berges du Rhône
Appel à communications pour une journée d'étude organisée le 23 septembre 2023
Sous la direction de Claudia Palazzolo et Marie Quiblier.
Le samedi 23 septembre 2023, aux Usines Fagor, dans le cadre de La Biennale de la Danse de Lyon
La journée d’étude souhaite interroger l’articulation des notions d’engagement et de participation dans la création chorégraphique contemporaine.
Danses en amateur, œuvres participatives, co-créations, projets de territoire, les dénominations prolifèrent mettant en lumière une disposition particulière du secteur chorégraphique à inclure « des non-professionnel·le·s » dans la fabrique du spectacle. De l’amateur·rice au·à la spectateur·rice, en passant par le·la témoin, l’habitant·e, le·la non-danseur·euse, la participation convoque des manières de « faire ensemble » diverses et variées (adresses aux publics, modes de recrutement et outils de mobilisation, temporalités et dynamiques de projet, financement et cadre administratif, signature).
Qu’il s’agisse de s’engager dans un processus de création au long cours ou de se prendre au jeu de la représentation le jour même, de contribuer dans l’ombre ou de s’exposer à la lumière des projecteurs, de reprendre une pièce historique ou de réaliser une forme inédite, l’engagement du·de la citoyen·ne lambda à l’œuvre est majoritairement vécu comme une expérience « hors du commun » valorisée comme telle. Jacques Rancière, dont le nom est sans cesse convoqué pour faire valoir le « partage du sensible » et la « redistribution des places » supposés dans les démarches participatives, propose une toute autre analyse de la situation : « Nous n’avons pas à transformer les spectateurs en acteurs et les ignorants en savants. Nous avons à reconnaître le savoir à l’œuvre dans l’ignorant et l’activité propre aux spectateurs » (1). Or, peu importe la pluralité des approches, la mise à contribution des publics s’accompagne dans la majorité des cas, d’un discours (porté autant par les artistes, les structures que les politiques publiques) qui tend à homogénéiser les intentions, à taire les contradictions, à lisser les irrégularités, sous couvert d’émancipation, de démocratisation et d’inclusion.
Qu’est-ce qui se dit dans cet appel renouvelé à prendre une part active dans la création ? De quoi cette injonction à la participation dans le secteur chorégraphique est-elle le signe ? Y a-t-il des invariants, des récurrences, des similarités dans ces pratiques chorégraphiques (malgré leur hétérogénéité) ? Dans ce cas, l’appétence de la danse contemporaine pour les formats participatifs serait-elle l’expression de quelque chose de « spécifiquement chorégraphique » relatif à la façon dont le médium engage (mouvemente [2]) ses publics ?
Au croisement d’enjeux esthétiques et éthiques, la réflexion portée sur les œuvres, les projets et les pratiques proposent de considérer la danse contemporaine à la fois comme une chambre d’écho des questions qui agitent nos sociétés contemporaines, et comme un laboratoire d’expérimentation de réponses singulières, circonstanciées et fécondes.
1/ Axes historiques et esthétiques
Face à la récurrence du modèle participatif dans les discours, les pratiques et les formes, le chercheur doit s’interroger : les danses participatives sont-elles vraiment spécifiques à l’époque actuelle ? Dans quelles mesures les danses des amateur·rice·s ont-elle nourri la création chorégraphique par le passé ? Peut-on retracer une histoire des œuvres chorégraphiques à l’aune de cette interaction entre danseur·euse·s amateur·rice·s et professionnel·le·s ? Peut-on considérer certaines saisons de l’histoire de la danse comme étant plus « inclusives » que d’autres ? Les interventions suivant cet axe pourront présenter des cas d’études d’œuvres du passé, mais aussi se pencher sur des tendances ou des genres, abordés sous le prisme de la place accordé aux non-professionnel·le·s.
S’intéressant également au travail de création, il s’agira de discuter ce qui nourrit le désir des artistes chorégraphiques à créer avec et pour des interprètes non-expérimenté·e·s ? Qu’est-ce que l’amateur·rice aurait que le·la professionnel·le n’a pas ou n’a plus ? « L’amateur n’a aucune connaissance, et d’habitude il ou elle fait ce que je demande parfaitement bien. Les professionnels, malheureusement, ont naturalisé plusieurs façons d’être sur scène ; danseurs contemporains, ils n’en ont plus conscience. Je trouve cela dégoûtant parce qu’ils reproduisent la même chose encore et encore sans en avoir conscience. Pour moi, c’est un cauchemar – voilà comment j’ai appris que la danse contemporaine était morte ! » (3) Quand Jérôme Bel présente l’ignorance de l’amateur·rice comme un remède « imparable » à la nécrose qui menace selon lui le spectacle de danse « trop bien huilé », ses propos nous laissent également entendre les risques d’instrumentalisation du « corps piéton » (4) inhérents à l’autorité qu’exerce le·la créateur·rice sur son œuvre. Qu’en est-il alors de l’expérience du·de la spectateur·rice dans les gradins ? Dans quelles mesures la vulnérabilité, l’innocence et la maladresse ainsi convoitées, exposées, mises en scène engagent-elles à une réévaluation des « normes » esthétiques, physiques, scéniques du spectacle de danse ? A l’appui de cas concrets et d’expériences singulières, cet axe sera l’occasion d’examiner les questions de création et de réception que l’art participatif adresse à l’œuvre chorégraphique.
2 / Axes sociologique, politique et économique
Au-delà des perspectives esthétiques et historiques, l’implication de « non-professionnel·le·s » dans le processus de création des œuvres a des répercussions d’ordre techniques et pragmatiques que ce soit au sein de la fabrique du spectacle, sur le paysage institutionnel ou dans la relation aux publics. Loin de minimiser ces approches, la journée d’étude propose de considérer les dimensions administratives, juridiques, économiques, politiques, humaines et sociologiques de la recrudescence des projets participatifs dans le secteur chorégraphique.
Souscrivant au point de vue d’Isabelle Ginot qui, dans son texte intitulé « Du piéton ordinaire » publié dans l’ouvrage Corps (in)croyables postule « que le corps piéton est une catégorie esthétique, produite par le champ de la danse professionnelle » (5), notre réflexion souhaiterait examiner également de quelles manières le développement de la participation des publics à l’œuvre constituerait une « stratégie » politique et institutionnelle pour adapter la création chorégraphique aux enjeux de démocratisation du service public de la culture. Est-ce que la participation de non-professionnel·le·s à la création déplace le travail des administrateur·rice·s, des chargé·e·s production et diffusion, des médiateur·rice·s ? En quoi la mise à contribution des publics modifie-t-elle les interactions entre professionnel·le·s et non-professionnel·le·s, la place qui leur accordée dans les structures, les relations aux territoires, ou encore les attentes et le « devenir » spectateur·rice ainsi que les profils des usagers ?Autant de questions que le colloque souhaiterait aborder en portant une attention particulière aux modalités de mise en œuvre des projets dans leurs dimensions opérationnelle et humaine : appels à participation ou mobilisation, processus de recrutement et/ou d’audition, organisation collective et formes de gouvernance du groupe des participant·e·s, dynamique et durée de projets, montage partenarial.
Dans quels cadres administratifs et juridiques s’inscrit la participation de l’individu « ordinaire » à la création ? Comment la contribution du public se formalise-t-elle contractuellement ? Bénévole, stagiaire, salarié·e ou simple participant·e ? La diversité des situations et la multiplicité des statuts mettent en exergue la complexité, voire l’impensé structurel de la place du·de la « non-professionnel·le » qui contribue à l’entreprise collective de production d’un spectacle. Derrière le problème administratif de l’encadrement, se déplie une série de questions relatives à la qualification de l’activité exercée comme la rétribution de l’engagement, la relation de subordination, le partage des responsabilités et des droits. C’est l’ensemble de l’organisation sociale du spectacle vivant qui doit s’adapter à l’arrivée de ses nouveaux « protagonistes » et revoir sa copie, non seulement à l’échelle d’un projet ou d’une création, mais plus globalement, au niveau des textes, des accords, des outils qui structuraient auparavant le secteur, sur la base d’une distinction étanche entre deux catégories : les professionnel·le·s impliqué·e·s pendant le processus et sur scène d’un côté, et les non-professionnel·le·s tenu·e·s à l’extérieur de la fabrique de l’autre. Une question se pose alors : le recours aux amateur·rice·s aurait-t-il un impact sur l’emploi du·de la danseur·euse professionnel·le ?
L’usage inflationniste du « participatif » s’inscrit dans un contexte plus large de crise de la démocratie représentative qui voit les notions d’empowerment, de droits culturels et d’inclusion mobilisées massivement comme critères d’orientation, de financement et d’évaluation des politiques publiques. Dans le secteur chorégraphique comme ailleurs, les dispositifs, les mesures et les financements fléchés en faveur de l’implication des publics se multiplient (émanant autant des services centraux et déconcentrés de l’Etat que des collectivités). Si le volontarisme des pouvoirs publics en matière de participation engage sur le long terme un rééquilibrage des moyens entre production, diffusion et médiation et une redistribution des rapports de force entre création et sensibilisation (au sein des institutions), il favorise également l’intrusion du politique dans les dynamiques de création, ne serait-ce que par la « manne financière » alors allouée à ces préconisations. Où en est-on aujourd’hui ? De la démocratisation culturelle à la démocratie culturelle, quel rôle joue la participation dans les évolutions structurelles et économiques du spectacle vivant ?
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1. Jacques Rancière, Le spectateur émancipé, La fabrique éditions, Paris, 2008, p. 24.
2. Emma Bigé, Mouvementements. Ecopolitiques de la danse, Paris, La Découverte, 2023.
3. Rafaella Uhiara, « L’enthousiasme pour l’amateur : une critique du professionnalisme chez Jérôme Bel et Philippe Quesne », Double jeu [En ligne], 15 | 2018, mis en ligne le 31 décembre 2019, consulté le 24 mars 2023. URL : http://journals.openedition.org/doublejeu/2374 ; DOI : https://doi.org/10.4000/doublejeu.2374
4. « Au contraire [du danseur amateur, sic], le danseur piéton, serait avant tout un danseur naïf [….] Le danseur piéton, prisé pour son état « naturel », serait ainsi celui qui n’a jamais reçu de « traitement dansant » : pas de pratique, pas de formation, pas d’entrainement. Ce danseur « surtout pas amateur » est prisé par les artistes pour son absence d’expérience de la danse », Isabelle Ginot, « Du piéton ordinaire », in Corps (in)croyables. Pratiques amateur en danse contemporaine, Paris, Centre National de la Danse, 2017, p. 29-30.
5. Isabelle Ginot, « Du piéton ordinaire », in Corps (in)croyables. Pratiques amateur en danse contemporaine, Paris, Centre National de la Danse, 2017, p. 29.
Modalités de candidature
Les propositions de communication doivent comporter un titre, un résumé de 1500 signes maximum et 2-3 lignes de présentation biographique.
Elles devront être envoyées avant le 12 juin 2023 aux adresses suivantes : claudia.palazzolo@univ-lyon2.fr; m.quiblier@univ-lyon2.fr
Une réponse sera donnée début juillet.
Modalités de participation
La journée d’étude aura lieu le samedi 23 septembre aux Usines Fagor à Lyon, dans le cadre de la Biennale de la danse.
La durée des communications est de 20mn.
Les frais de transports, d’hébergement et le repas sont pris en charge par l’université et les partenaires.
Cette journée d’étude est accueillie dans le cade de la Biennale de la danse de Lyon, soutenue par le laboratoire Passages XX-XXI -EA 4160 et la Biennale de la danse de Lyon, en partenariat avec la MGEN.
Contacts
Claudia Palazzolo : claudia.palazzolo@univ-lyon2.fr
Marie Quiblier : m.quiblier@univ-lyon2.fr
Le samedi 23 septembre 2023, aux Usines Fagor, dans le cadre de La Biennale de la Danse de Lyon
La journée d’étude souhaite interroger l’articulation des notions d’engagement et de participation dans la création chorégraphique contemporaine.
Danses en amateur, œuvres participatives, co-créations, projets de territoire, les dénominations prolifèrent mettant en lumière une disposition particulière du secteur chorégraphique à inclure « des non-professionnel·le·s » dans la fabrique du spectacle. De l’amateur·rice au·à la spectateur·rice, en passant par le·la témoin, l’habitant·e, le·la non-danseur·euse, la participation convoque des manières de « faire ensemble » diverses et variées (adresses aux publics, modes de recrutement et outils de mobilisation, temporalités et dynamiques de projet, financement et cadre administratif, signature).
Qu’il s’agisse de s’engager dans un processus de création au long cours ou de se prendre au jeu de la représentation le jour même, de contribuer dans l’ombre ou de s’exposer à la lumière des projecteurs, de reprendre une pièce historique ou de réaliser une forme inédite, l’engagement du·de la citoyen·ne lambda à l’œuvre est majoritairement vécu comme une expérience « hors du commun » valorisée comme telle. Jacques Rancière, dont le nom est sans cesse convoqué pour faire valoir le « partage du sensible » et la « redistribution des places » supposés dans les démarches participatives, propose une toute autre analyse de la situation : « Nous n’avons pas à transformer les spectateurs en acteurs et les ignorants en savants. Nous avons à reconnaître le savoir à l’œuvre dans l’ignorant et l’activité propre aux spectateurs » (1). Or, peu importe la pluralité des approches, la mise à contribution des publics s’accompagne dans la majorité des cas, d’un discours (porté autant par les artistes, les structures que les politiques publiques) qui tend à homogénéiser les intentions, à taire les contradictions, à lisser les irrégularités, sous couvert d’émancipation, de démocratisation et d’inclusion.
Qu’est-ce qui se dit dans cet appel renouvelé à prendre une part active dans la création ? De quoi cette injonction à la participation dans le secteur chorégraphique est-elle le signe ? Y a-t-il des invariants, des récurrences, des similarités dans ces pratiques chorégraphiques (malgré leur hétérogénéité) ? Dans ce cas, l’appétence de la danse contemporaine pour les formats participatifs serait-elle l’expression de quelque chose de « spécifiquement chorégraphique » relatif à la façon dont le médium engage (mouvemente [2]) ses publics ?
Au croisement d’enjeux esthétiques et éthiques, la réflexion portée sur les œuvres, les projets et les pratiques proposent de considérer la danse contemporaine à la fois comme une chambre d’écho des questions qui agitent nos sociétés contemporaines, et comme un laboratoire d’expérimentation de réponses singulières, circonstanciées et fécondes.
1/ Axes historiques et esthétiques
Face à la récurrence du modèle participatif dans les discours, les pratiques et les formes, le chercheur doit s’interroger : les danses participatives sont-elles vraiment spécifiques à l’époque actuelle ? Dans quelles mesures les danses des amateur·rice·s ont-elle nourri la création chorégraphique par le passé ? Peut-on retracer une histoire des œuvres chorégraphiques à l’aune de cette interaction entre danseur·euse·s amateur·rice·s et professionnel·le·s ? Peut-on considérer certaines saisons de l’histoire de la danse comme étant plus « inclusives » que d’autres ? Les interventions suivant cet axe pourront présenter des cas d’études d’œuvres du passé, mais aussi se pencher sur des tendances ou des genres, abordés sous le prisme de la place accordé aux non-professionnel·le·s.
S’intéressant également au travail de création, il s’agira de discuter ce qui nourrit le désir des artistes chorégraphiques à créer avec et pour des interprètes non-expérimenté·e·s ? Qu’est-ce que l’amateur·rice aurait que le·la professionnel·le n’a pas ou n’a plus ? « L’amateur n’a aucune connaissance, et d’habitude il ou elle fait ce que je demande parfaitement bien. Les professionnels, malheureusement, ont naturalisé plusieurs façons d’être sur scène ; danseurs contemporains, ils n’en ont plus conscience. Je trouve cela dégoûtant parce qu’ils reproduisent la même chose encore et encore sans en avoir conscience. Pour moi, c’est un cauchemar – voilà comment j’ai appris que la danse contemporaine était morte ! » (3) Quand Jérôme Bel présente l’ignorance de l’amateur·rice comme un remède « imparable » à la nécrose qui menace selon lui le spectacle de danse « trop bien huilé », ses propos nous laissent également entendre les risques d’instrumentalisation du « corps piéton » (4) inhérents à l’autorité qu’exerce le·la créateur·rice sur son œuvre. Qu’en est-il alors de l’expérience du·de la spectateur·rice dans les gradins ? Dans quelles mesures la vulnérabilité, l’innocence et la maladresse ainsi convoitées, exposées, mises en scène engagent-elles à une réévaluation des « normes » esthétiques, physiques, scéniques du spectacle de danse ? A l’appui de cas concrets et d’expériences singulières, cet axe sera l’occasion d’examiner les questions de création et de réception que l’art participatif adresse à l’œuvre chorégraphique.
2 / Axes sociologique, politique et économique
Au-delà des perspectives esthétiques et historiques, l’implication de « non-professionnel·le·s » dans le processus de création des œuvres a des répercussions d’ordre techniques et pragmatiques que ce soit au sein de la fabrique du spectacle, sur le paysage institutionnel ou dans la relation aux publics. Loin de minimiser ces approches, la journée d’étude propose de considérer les dimensions administratives, juridiques, économiques, politiques, humaines et sociologiques de la recrudescence des projets participatifs dans le secteur chorégraphique.
Souscrivant au point de vue d’Isabelle Ginot qui, dans son texte intitulé « Du piéton ordinaire » publié dans l’ouvrage Corps (in)croyables postule « que le corps piéton est une catégorie esthétique, produite par le champ de la danse professionnelle » (5), notre réflexion souhaiterait examiner également de quelles manières le développement de la participation des publics à l’œuvre constituerait une « stratégie » politique et institutionnelle pour adapter la création chorégraphique aux enjeux de démocratisation du service public de la culture. Est-ce que la participation de non-professionnel·le·s à la création déplace le travail des administrateur·rice·s, des chargé·e·s production et diffusion, des médiateur·rice·s ? En quoi la mise à contribution des publics modifie-t-elle les interactions entre professionnel·le·s et non-professionnel·le·s, la place qui leur accordée dans les structures, les relations aux territoires, ou encore les attentes et le « devenir » spectateur·rice ainsi que les profils des usagers ?Autant de questions que le colloque souhaiterait aborder en portant une attention particulière aux modalités de mise en œuvre des projets dans leurs dimensions opérationnelle et humaine : appels à participation ou mobilisation, processus de recrutement et/ou d’audition, organisation collective et formes de gouvernance du groupe des participant·e·s, dynamique et durée de projets, montage partenarial.
Dans quels cadres administratifs et juridiques s’inscrit la participation de l’individu « ordinaire » à la création ? Comment la contribution du public se formalise-t-elle contractuellement ? Bénévole, stagiaire, salarié·e ou simple participant·e ? La diversité des situations et la multiplicité des statuts mettent en exergue la complexité, voire l’impensé structurel de la place du·de la « non-professionnel·le » qui contribue à l’entreprise collective de production d’un spectacle. Derrière le problème administratif de l’encadrement, se déplie une série de questions relatives à la qualification de l’activité exercée comme la rétribution de l’engagement, la relation de subordination, le partage des responsabilités et des droits. C’est l’ensemble de l’organisation sociale du spectacle vivant qui doit s’adapter à l’arrivée de ses nouveaux « protagonistes » et revoir sa copie, non seulement à l’échelle d’un projet ou d’une création, mais plus globalement, au niveau des textes, des accords, des outils qui structuraient auparavant le secteur, sur la base d’une distinction étanche entre deux catégories : les professionnel·le·s impliqué·e·s pendant le processus et sur scène d’un côté, et les non-professionnel·le·s tenu·e·s à l’extérieur de la fabrique de l’autre. Une question se pose alors : le recours aux amateur·rice·s aurait-t-il un impact sur l’emploi du·de la danseur·euse professionnel·le ?
L’usage inflationniste du « participatif » s’inscrit dans un contexte plus large de crise de la démocratie représentative qui voit les notions d’empowerment, de droits culturels et d’inclusion mobilisées massivement comme critères d’orientation, de financement et d’évaluation des politiques publiques. Dans le secteur chorégraphique comme ailleurs, les dispositifs, les mesures et les financements fléchés en faveur de l’implication des publics se multiplient (émanant autant des services centraux et déconcentrés de l’Etat que des collectivités). Si le volontarisme des pouvoirs publics en matière de participation engage sur le long terme un rééquilibrage des moyens entre production, diffusion et médiation et une redistribution des rapports de force entre création et sensibilisation (au sein des institutions), il favorise également l’intrusion du politique dans les dynamiques de création, ne serait-ce que par la « manne financière » alors allouée à ces préconisations. Où en est-on aujourd’hui ? De la démocratisation culturelle à la démocratie culturelle, quel rôle joue la participation dans les évolutions structurelles et économiques du spectacle vivant ?
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1. Jacques Rancière, Le spectateur émancipé, La fabrique éditions, Paris, 2008, p. 24.
2. Emma Bigé, Mouvementements. Ecopolitiques de la danse, Paris, La Découverte, 2023.
3. Rafaella Uhiara, « L’enthousiasme pour l’amateur : une critique du professionnalisme chez Jérôme Bel et Philippe Quesne », Double jeu [En ligne], 15 | 2018, mis en ligne le 31 décembre 2019, consulté le 24 mars 2023. URL : http://journals.openedition.org/doublejeu/2374 ; DOI : https://doi.org/10.4000/doublejeu.2374
4. « Au contraire [du danseur amateur, sic], le danseur piéton, serait avant tout un danseur naïf [….] Le danseur piéton, prisé pour son état « naturel », serait ainsi celui qui n’a jamais reçu de « traitement dansant » : pas de pratique, pas de formation, pas d’entrainement. Ce danseur « surtout pas amateur » est prisé par les artistes pour son absence d’expérience de la danse », Isabelle Ginot, « Du piéton ordinaire », in Corps (in)croyables. Pratiques amateur en danse contemporaine, Paris, Centre National de la Danse, 2017, p. 29-30.
5. Isabelle Ginot, « Du piéton ordinaire », in Corps (in)croyables. Pratiques amateur en danse contemporaine, Paris, Centre National de la Danse, 2017, p. 29.
Modalités de candidature
Les propositions de communication doivent comporter un titre, un résumé de 1500 signes maximum et 2-3 lignes de présentation biographique.
Elles devront être envoyées avant le 12 juin 2023 aux adresses suivantes : claudia.palazzolo@univ-lyon2.fr; m.quiblier@univ-lyon2.fr
Une réponse sera donnée début juillet.
Modalités de participation
La journée d’étude aura lieu le samedi 23 septembre aux Usines Fagor à Lyon, dans le cadre de la Biennale de la danse.
La durée des communications est de 20mn.
Les frais de transports, d’hébergement et le repas sont pris en charge par l’université et les partenaires.
Cette journée d’étude est accueillie dans le cade de la Biennale de la danse de Lyon, soutenue par le laboratoire Passages XX-XXI -EA 4160 et la Biennale de la danse de Lyon, en partenariat avec la MGEN.
Contacts
Claudia Palazzolo : claudia.palazzolo@univ-lyon2.fr
Marie Quiblier : m.quiblier@univ-lyon2.fr
Informations pratiques
Lieu(x)
Campus Berges du Rhône
Maison Internationale des Langues et des Cultures
35 rue Raulin 69007, Lyon
35 rue Raulin 69007, Lyon