« Que faut-il censurer : les mots ou les idées, la forme ou le fond ? » : réception, (re)traduction et récupération de La Garçonne (1922), de Victor Margueritte, en Espagne
Le romancier français Victor Margueritte (1866-1942) est considéré comme l’un des auteurs féministes les plus notables du XXe siècle. L’une de ses œuvres les plus célèbres – et aussi les plus scandaleuses – est sans aucun doute La Garçonne (1922), qui dépeint une jeune femme indépendante et sexuellement libérée.
Malgré la controverse en France, le livre fut traduit en Espagne dans les années 1920 sous le titre de La Garzona (n.d.). Pendant la dernière période du régime franquiste, c'est-à-dire les années 1960 et 1970, plusieurs maisons d'édition ont voulu importer le livre, tant dans sa version française que dans sa traduction argentine, intitulée La lesbiana (1974). En effet, l’Archivo General de la Administración (AGA), situé à Alcalá de Henares, renferme quatre dossiers en rapport avec l’importation du roman en Espagne. Les importations en français ont été refusées et ce n’est qu’après la mort de Franco que la version argentine a été acceptée. En 2015, l’ouvrage de Margueritte – dont le titre français La garçonne est conservé en espagnol – a été retraduit et récupéré grâce à la maison d’édition Gallo Nero et à sa traductrice Marta Cabanillas.
Par conséquent, dans cette communication, notre objectif est de présenter, tout d’abord, la réception de La Garçonne dans les journaux en France et en Espagne, ainsi que ses dossiers d’importation pendant la dictature franquiste. Deuxièmement, nous avons l’intention de comparer la traduction réalisée en Espagne dans les années 1920 avec les deux traductions ultérieures mentionnées ci-dessus, dans le but de constater d’éventuelles similitudes et différences entre les trois versions. Enfin, nous nous concentrerons sur notre redéfinition de la stratégie de traduction féministe connue sous le nom de « récupération » ou de « réhabilitation » (Panchón Hidalgo & Zaragoza Ninet, sous presse) d’abord forgée en anglais – « recovery » – par Massardier-Kenney (1997) afin de rendre visibles les autrices et auteurs féministes qui ont été censurés pendant le franquisme (1939-1975) et oubliés pour des raisons sociopolitiques.
Bibliographie :
- Margueritte, Victor (1922) La Garçonne. Paris : Flammarion.Margueritte, Victor (s.f.) La Garzona.
Madrid : Colección Sugestiva.
- Margueritte, Victor (1974) La Lesbiana. Buenos Aires : Minerva.
- Margueritte, Victor (2015) La garçonne. Madrid : Gallo Nero.
- Massardier-Kenney, Françoise (1997) « Towards a Redefinition of Feminist Translation Practice ». The Translator 3.1 : 55-69.
- Panchón Hidalgo, Marian ; Zaragoza Ninet, Gora (sous presse) « Recovery » / « Récupération » ou « Réhabilitation » / « Recuperación ». Dictionnaire du genre en traduction / Dictionnary of Gender in Translation / Diccionario del género en traducción. ISSN : 2967-3623. http://worldgender.cnrs.fr
Marian PANCHÓN HIDALGO est traductrice assermentée (FR-ESP) et docteure en Traductologie de l’Université de Salamanque et de l’Université Toulouse – Jean Jaurès. Elle est enseignante-chercheuse à la Faculté de Traduction et d’Interprétation de l’Université de Grenade depuis 2020. Elle a également enseigné dans plusieurs universités françaises (Université de Tours, Université de Nîmes, Université de Franche-Comté) et elle a été chercheuse invitée à l’Université Jean Monnet – Saint-Étienne, à l’Université Sorbonne Paris Nord, à l’Université Nationale de La Plata (Argentine) et à l’ENS de Lyon. Elle est membre du laboratoire AVANTI de l’Université de Grenade et chercheuse associée au laboratoire TRACE (TRAducción y CEnsura) de l’Université de León. Ses recherches portent sur la traduction, l'(auto)censure et la réception de la littérature francophone pendant la dictature franquiste (1939-1975). Elle s’intéresse également aux questions liées à la paratraduction et à la retraduction.
Informations pratiques
Lieu(x)
Campus Berges du Rhône
18, quai Claude Bernard
69007 Lyon