Publié le 10 décembre 2020 Mis à jour le 18 décembre 2020
le 7 avril 2017
Campus Berges du Rhône
9h-18h

État des lieux de la recherche en poésie moderne/contemporaine des deux côtés de l'Atlantique

Organisation : Carrie Noland (U.C. Irvine), Axel Nesme

Dans le champ des études littéraires, la France et les États-Unis sont très proches, mais divergent aussi de manière significative. Après 1966, date de la célèbre intervention de Derrida à Johns Hopkins University sur « La structure, le signe et le jeu », la critique américaine suit attentivement la production française en matière de théorie littéraire et philosophique, et c’est longtemps la France qui a mené  le jeu. Est-ce toujours le cas aujourd’hui ? On peut se le demander, notamment à la lecture de l'appel à communications du congrès de l’Association Française d’Etudes Américaines de 2016, où les problématiques actuellement privilégiées outre-Atlantique (questions d’inter- et de trans-disciplinarité, gender studies, disability studies, white studies…) sont, sinon majoritaires, du moins tout aussi présentes que des questionnements situés dans le sillage du structuralisme et du post-structuralisme et relevant à ce titre d’une approche plus « typiquement » française.

Dans le domaine de la poésie plus particulièrement, on constate l’intérêt croissant que suscitent les critical race studies, et dont témoigne la journée d'étude récemment consacrée au travail du poète/critique afro-américain Fred Moten, montrant que certain.es américanistes français.es s’orientent vers une approche de la poésie qui met en avant les questions de contexte historique, de performance, d’ethnicité, et de sexualité. 

Si toutefois l’on tourne son regard vers l'autre côté de l'Atlantique, on peut s'étonner du relatif manque d'intérêt des chercheur.es américain.es spécialistes de poésie américaine pour le travail des critiques français.es. Il est vrai que certains travaux consacrés à la question du lyrisme incluent quelques références ponctuelles à des travaux publiés en France (on songe en particulier à l’ouvrage récent de J. Culler qui mentionne les Figures du sujet lyrique de D. Rabaté, ou encore à la théorie du lyrisme de M. Blasing, en partie inspirée par certain.es auteur.es théoricien.nes français.es, tel.les Kristeva, Lacoue-Labarthe, Leclaire ou Lacan). Mais il s’agit là de cas isolés. Cette place marginale accordée à la critique française est plus surprenante encore s’agissant des travaux consacrés, aux États-Unis, à la poésie française et francophone. La manière dont la théorie du lyrisme — ou plus généralement la poétique — a évolué ici en France au cours des deux dernières décennies est somme toute rarement étudiée aux États Unis, et les chercheur.es qui travaillent sur la poésie moderne et contemporaine citent rarement leurs homologues français.es. Ce phénomène est d’autant plus visible que le nombre de chercheur.es en poésie est restreint aux États-Unis. S’il est vrai que le flot de publications consacrées à Baudelaire ne tarit pas aux États-Unis, la riche poésie du XXe siècle — d'Apollinaire à Emmanuel Hocquard — reste dans l'ombre, et semble mal connue des universitaires américain.es. On comprend, dès lors, que les chercheur.es français.es qui publient sur cette poésie soient moins bien connu.es encore.

Face à ce constat, il s’agira de se demander s’il est toujours vrai que l'historicisme et le contextualisme — volontiers associés avec l'approche des chercheur.es américain.es — sont au fond en désaccord avec le formalisme et le conceptualisme qui caractérisent l'approche française. Peut-on mettre en regard ces deux grandes orientations, identifier des points communs éventuels, et travailler à détisser les stéréotypes qui continuent à exercer leur emprise?  Ne convient-il pas d’interroger la distinction même entre "historicisme" et "formalisme," contexte et performance, voire entre les "critical race studies" et l’anthropologie textuelle d’un Meschonnic ?  

Notre objectif pour ces journées d'étude sera de mettre en conversation des chercheur.es en poésie des deux côtés de l'Atlantique et de dresser un état des lieux de la recherche en poésie moderne/contemporaine en réunissant spécialistes français.es et américain.es de la poésie française et américaine afin de mettre en lumière les protocoles théoriques et méthodologiques qui s’élaborent aujourd’hui dans ces deux domaines d'étude historiquement solidaires. Les interventions pourront revêtir la forme d’un manifeste, de l’analyse serrée exemplaire d’une approche critique, ou d’une interrogation sur les présupposés d’une démarche critique. Le format adopté encouragera au maximum les occasions de partage et d'échange au cours de cette rencontre qui débouchera sur une table ronde où il s’agira de dresser le bilan des approches soutenues et de mettre en lumière les tensions qui auront  vu le jour.
 
 
Programme détaillé
  • 9h / Accueil
  • 9h30 / Dominique Rabaté (Université Paris-Diderot) : « L'expérience lyrique du côté du lecteur »
  • 10h10 / Amélie Ducroux (Université Lumière-Lyon 2) : « Jouer le jeu du poème »
  • 10h50 / Pause
  • 11h10 / Véronique Corinus (Université Lumière-Lyon 2) : « Écouter le conteur pour relire le poète. Réflexions sur l'intertexte patrimonial »
  • 11h40 / Yamna Chadli (Université Bordeaux-Montaigne) : « Je polyphonique dans la poésie de la rive (poésie maghrébine francophone »
  • 12h20-14h / Déjeuner
  • 14h / Dominique Carlat (Université Lumière-Lyon 2) : « Autour de la performance poétique contemporaine: un double contexte ? »
  • 14h40 / Isabelle Alfandary (Université de la Sorbonne-Nouvelle) : « Texte et critique du texte poétique »
  • 15h20 / Antoine Cazé (Université Paris-Diderot) : « La pensée lyrique : Emily Dickinson »
  • 15h50 / Pause
  • 16h20 / Jean-Pierre Bobillot (Université Grenoble-Alpes) : « Qu'est-ce que la médiopoétique ? »
  • 17h / Abigail Lang (Université Paris-Diderot) : « Échanges franco-américains en poésie (1970-2000): vers une communauté transatlantique? »
  • 17h30 / Jean-Marie Gleize, écrivain, poète et critique : lecture de quelques uns de ses textes

Informations pratiques

Lieu(x)

Campus Berges du Rhône

Salle des colloques